mardi 14 décembre 2010

The Walking Dead - Bilan saison 1

Vous savez à quoi on reconnaît la personne de sa vie ? A plein de choses bien sûr. Quand vous avez un sourire qui se dessine sur votre visage quand vous pensez à elle, quand la voix intérieure qui se ballade dans votre tête depuis des années devient la sienne etc etc, mais également quand vous emménagez avec elle et que vous découvrez, sans grande surprise, qu’il y a une bonne cinquantaine de films en double au moment de réunir vos collections de dvd. Quand vous découvrez que parmi ces doublons se trouvent beaucoup de films de zombie, vous pouvez alors vous dire sans crainte : « c’est elle ! »




On aime beaucoup les zombies chez les Lord-Dumeur, je me rappelle qu’une de nos premières soirées en couple se composait d’un bon petit dîner avec foie gras et vin blanc avec en plus la découverte de la mini-série anglaise Dead-set, et pour rester dans l’anecdote romantique c’est en offrant la BO de Zombie (L’armée des morts mon cœur ! note de l’épouse) que j’ai tenté d’embrasser pour la première fois ma future femme*.

Bref comme dirait l’autre : « les zombies c’est la vie ». Ce que j’apprécie dans les histoires qui mettent en scène ces créatures, c’est qu’elles permettent d’une part une étude des comportements humains face à une menace implacable, et que d’autre part c’est généralement l’occasion de voir des jolies scènes gores pleines de poésie. C’est un peu une manière de joindre l’utile à l’agréable qui s’offre à nous. A l’instar du vampire, le zombie peut facilement se décliner à toutes les sauces et offrir continuellement un nouveau point de vue. Certes on peut aisément dresser un schéma type du film de zombie qui se composerait d’une ouverture mettant en scène la chute de nos sociétés, suivie d’une focalisation sur un groupe de personnes diverses et antagonistes tenant de survivre dans un refuge assailli par les zombies. C’est le squelette de moult films de zombie, du nanar ultime au chef d’œuvre intemporel. Pourtant on se retrouve parfois face à des traitements originaux qui apportent de la fraîcheur sans pour autant mettre de coté les ficelles du genre. Conserver l’héritage du passé pour essayer d’aller sur d’autres chemins c’est d’ailleurs la force de ces films.

Tout cela pour dire que le zombie est une créature qui permet d’écrire à peu près tout et n’importe quoi. Si on s’éloigne du cinéma on pourra notamment découvrir les deux ouvrages de Max Brooks, à savoir Le guide de survie en territoire zombie et surtout le magnifique World War Z un ouvrage qui relate une invasion de morts-vivants à l’échelle mondiale dont les conséquences géopolitiques et sociologiques sont mises en valeur par des témoignages de survivants recueillis par le narrateur. C’est un bouquin fabuleux que je conseille à tout le monde même (et surtout) à ceux qui ne sont pas familiers des morts qui se lèvent de leurs tombes. Sa manière d’analyser la chute et la redéfinition d’un monde est très intéressante et la diversité des situations rencontrées (vie dans un château fort ou dans un sous-marin, transmission du virus causée par le trafic illégal d’organes, etc etc) pourrait facilement nourrir une bonne dizaine de films. Les zombies ont également envahi les comics-books. Ainsi les deux grandes firmes américaines Marvel et DC Comics ont lancé avec succès des séries où les super-héros font face à une invasion de morts-vivants.Cependant si vous êtes des amateurs des gentils humains qui veulent manger le cerveau de leurs copains je vous conseillerais plutôt de lire The Walking Dead de Robert Kirkman.




Gros succès dans les librairies, la bd suit les périples d’un groupe de survivants dans une terre peuplée de morts-vivants. Dessiné en noir et blanc, The Walking Dead tire sa popularité de sa violence graphique ainsi que d’une histoire qui ne laisse aucun répit à ses personnages et surtout à son héros, Rick Grimes. Si j’apprécie la bd dans sa manière de nous montrer les réactions d’un groupe de personnages hétéroclites plongés dans un environnement exceptionnel, je lui reproche toutefois une écriture trop balisée et une violence tellement accrue qu’elle en atténue l’impact des scènes au fur et à mesure de l’intrigue. A ma première lecture je trouvais que The Walking Dead se rapprochait énormément de la série Oz de Barry Levinson et Tom Fontana que ce soit dans le propos que dans les défauts, et à l’annonce de l’adaptation télévisuelle de la bd mon premier espoir s’est porté sur la correction de ces erreurs.

Si de par son sujet la série n’était pas assurée d’un grand succès, on ne peut pas dire que la production n’ait pas tout fait pour mettre toutes les chances de son coté. La présence dans la production de Gale Ann Hurd, de Frank Darabont - dont le The Mist reste ancré dans les mémoires - de Robert Kirkman l’auteur de la bande dessinée, et de Gregory Nicoreto concepteur d’effets spéciaux renommé, nous prouve que la conception de la série est prise très au sérieux. Le fait d’être produite pour la chaîne câblée AMC (à qui l’on doit Breaking Bad) garantit une liberté de ton et une audace visuelle ; enfin le faible nombre d’épisodes (six pour la première saison) limite les dégâts en cas d’échec tout en obligeant a priori les scénaristes à énormément de rigueur dans l’écriture des histoires. Lancé le soir d’Halloween, la série est un très gros succès d’audience qui, chose surprenante et réjouissante, ne se dément pas tout au long de la diffusion. Il faut donc croire que l’équipe a fait de très bons choix dans la production de la série et que cela a payé. Toutefois malgré la popularité indéniable de la série, je ne peux m’empêcher de penser qu’il aurait fallu également que les scénaristes fassent les bons choix dans leur travail.




Je ne vais pas tourner autour du pot pendant 107 ans, je trouve cette première saison globalement ratée et le reproche que je lui fais tient dans l’écriture et la gestion du rythme de la saison. Tout commence bien pourtant, en évitant de trop coller à la bd et en se démarquant progressivement de l’histoire originale avec l’aval de l’auteur, The Walking Dead version tv crée sa propre identité. Cette décision ne peut-être que bénéfique pour le show, en effet elle permet de mieux prendre en compte les spécificités du média que ce soit dans la forme (on ne regarde pas une série comme on lit une bd) que dans le fond (malgré la tolérance qu’offre une diffusion sur le câble on a du mal à imaginer certaines scènes de la bd à la télé). Ainsi, si le premier épisode (avec le recul probablement le meilleur) reste très proche de l’histoire originale, les changements apparaissent dès le second avec l’ajout de nouveaux personnages et des situations inédites principalement axées autour des frères redneck Merle et Daryl Nixon, et la recherche d’un sac d’armes à feu. Pourtant au fur et à mesure des épisodes et à la vue du final de la saison, on se rend compte que cette nouvelle approche a mal été gérée par les scénaristes. Ce n’est donc pas tant ces rajouts qui plombent la série (au contraire un personnage comme Daryl est un antagoniste idéal pour ce genre de situation) que la façon dont ceux-ci sont traités. Alors que les deux premiers épisodes et une partie du troisième restent constamment sur le fil rouge principal de l’histoire (la quête de Rick pour retrouver sa famille), et cela même au travers d’histoires annexes, la série peine ensuite à conserver cette rigueur. La situation paraît pourtant très claire : après les retrouvailles de Rick avec sa famille, le leitmotiv suivant est de se concentrer sur la survie au jour le jour du groupe afin de conserver son humanité tant sur le plan physique que moral. Mais alors qu’on aurait pu penser que la série allait s’attarder sur les membres du groupe dont les antagonismes nous sont montrés durant le troisième épisode Tell It to the Frog, celle-ci prend le contre-pied de nos attentes pour renvoyer Rick et le spectateur à Atlanta dans une aventure dont la conclusion intéressante n’arrive pas à cacher une mauvaise exécution. La pertinence de cette sous-intrigue est encore plus mise à mal quand arrive le massacre du camp qui clôt la fin du quatrième  épisode. Au final la deuxième excursion de Rick apparaît comme un grossier prétexte d’éloigner les éléments forts du groupe afin de faciliter l’attaque des zombies et de faire du remplissage ; pour une saison composée de six épisodes cela est assez ridicule.

Si la décision de Rick de repartir à Atlanta et ses conséquences sont traitées correctement par la suite avec un bref échange, le choix des scénaristes de s’être focalisés sur les événements en ville et non pas sur le groupe est quant à lui beaucoup plus critiquable et révèle ses failles dans un cinquième épisode, Wildfire, dont les scènes pâtissent de la mauvaise écriture des épisodes précédents. Les morts de certains personnages sont ainsi dénués d’émotions de part le faible développement de ces derniers. Ce manque de rigueur et ces mauvais choix sont d’autant plus dommageables à la vision du dernier épisode de la saison qui rehausse le show un peu trop tard et met plus encore en lumière les problèmes d’écriture. Ainsi cette aventure dans le CDC et la rencontre avec le docteur Edwin Jenner a beau être intéressante dans sa manière de relancer la dynamique du groupe, en installant ou confirmant certains liens, sa position en tant que final season laisse perplexe. Ce n’est pas tant qu’il n’arrive pas à offrir une conclusion correcte que le fait qu’il ne semble pas écrit pour être une conclusion de saison et c’est avec un sentiment d’inachevé qu’on regarde le générique final. Il est vraisemblable que le faible nombre d’épisodes a plus été une contrainte qu’autre chose. Plusieurs des erreurs émises plus haut auraient été évitées et diluées sur treize épisodes. Par ailleurs il est intéressant de constater que les meilleurs passages ainsi que les personnages les mieux brossés sont ceux qui sont directement extraits du comics (Rick et Dale en tête) à l’exception notable de Daryl, création pour la série dont la forte présence doit beaucoup au charisme de son interprète, Norman Reedus. Le personnage de Shane quant à lui semble bien gêner les scénaristes. D’un personnage de bd monolithique dont le but de la présence était de renforcer le dilemme moral de la femme de Rick et de créer une prise de conscience pour le ce dernier de la fin du monde telle qu’il se l’imaginait, les scénaristes ont voulu apporter une consistance nécessaire au passage sur le petit écran mais n’arrivent pas à savoir s’ils doivent en faire un opposant frontal à Rick tout en étant bon, ou bien un amant éconduit devenant un salaud de première assez pitoyable.




Bon je ne voudrais quand même pas noircir totalement le tableau et finir sur une impression totalement négative. Il y a des bonnes choses dans la série, notamment sur le plan visuel. Les épisodes sont très bien réalisés et surtout la série n’est pas avare en gore et offre de très bons moments de barbaque bien fraîche et pour le coup c’est assez réjouissant de voir cela à la télé bien que là encore on assiste à un déséquilibre significatif entre les deux premiers épisodes et la suite, à croire que la majorité du budget a été engloutie dans les deux premiers épisodes. Le point fondamental pour une série étant raté, ce qui se présentait comme une des œuvres les plus originales et enthousiasmantes de la rentrée s’avère dans sa première saison une très grosse déception et ce d’autant plus qu’elle avait toutes les clés en mains pour être réussie en tout point. J’espère vraiment que ces erreurs seront corrigées dans la deuxième saison. Pour l’heure avec la fin provisoire de la bande de Rick, mon esprit se porte vers des contrées plus anciennes où des luttes entre puissantes familles pour l’accession au pouvoir et au trône vont éclater alors que l’hiver approche.





*Je me suis pris un vent d’ailleurs et je n’ai pu l’embrasser qu’en sortant l’artillerie lourde : l’intégrale de Spaced (oui je sais je suis une femme vénale – Note de l’épouse).

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