jeudi 14 janvier 2021

Star Trek : Deep Space Nine - 2ème partie : Bajor, l'ultime frontière et au delà

 


 

 

 

 

 

Deep Space Nine est donc une station spatiale en orbite autour de la planète Bajor et va servir de point de relais entre la Fédération et le gouvernement Bajorien dans le cadre de la reconstruction de la planète. C’est ce qui est prévu au départ mais tout va changer dès le premier épisode.

Deux mot : Vortex (wormhole en anglais) et émissaire (ça tombe bien c’est le titre du premier épisode). Opaka, la leader religieux (le Kai) de Bajor, est en effet persuadée que Sisko est envoyé par les dieux pour découvrir le Temple Céleste. Afin de le convaincre, elle lui montre leur relique la plus précieuse : l’orbe. Un artefact qui donne des visions à celui qui l’ouvre. En l’étudiant, Jadzia Dax découvre un lien entre ce dernier et un mystérieux phénomène situé non loin de la station. En s’y rendant Sisko et Dax découvre qu’il s’agit d’un vortex au sein duquel vivent les fameux Prophètes. En réalité une race extraterrestre très singulière puisqu’ils n’ont aucune réelle présence physique mais surtout aucune existence linéaire. Passé, présent et futur existent sur le même plan pour eux.

Enfin et surtout, Sisko découvre que ce vortex relie en quelques heures leur quadrant (l’Alpha) avec le quadrant Gamma pourtant situé à l’autre bout de la galaxie. Dès lors et après quelques péripéties, Deep Space Nine passe de simple station spatiale à base incontournable et comptoir essentiel pour toute la galaxie. Dorénavant nul besoin de partir à l’aventure, c’est l’aventure qui viendra à vous. C’est sur ce dernier point que Star Trek : Deep Space Nine représente un changement radical avec les séries précédentes. Alors que ces dernières proposaient les aventures de vaisseaux spatiaux parcourant la galaxie là où personne n’est jamais allé, DS9 va, elle, se reposer sur une unité de lieu immuable. Ça n’a l’air de rien comme cela mais ce qui est au départ un choix pouvant être assimilé à une démarcation cosmétique va se révéler être déterminant dans les spécificités même de la série, faisant d’elle l’un des meilleurs space-opera télévisuel de l’époque.

La création de Star Trek : Deep Space Nine remonte à 1991 quand le nouveau président de Paramount Pictures, Brandon Tartikoff (auparavant le directeur des programmes de NBC chez qui il lança Seinfeld, Cheers, Golden Girls, Cosby Show, Law&Order, Miami Vice etc. bref c’était pas le dernier des cons) demande à Rick Berman de réfléchir à une nouvelle série pour capitaliser sur le succès de Star Trek : The Next Generation alors à l’antenne depuis cinq ans.

 


 

 

Après deux saisons de balbutiements, les aventures de l’Enterprise-D sont en effet à leur apogée tant sur le plan critique que public et un nouveau film de la série classique (Star Trek VI - The Undiscovered Country) va sortir pour les 25 ans de la saga. Bref il faut battre le fer tant qu’il est chaud. Berman est de l’aventure depuis le début de The Next Generation et il est officiellement à la tête de la production de la saga depuis la mort de Gene Roddenberry en 1991 (officieusement il l’est depuis 1988 quand Roddenberry fut trop malade pour continuer à travailler) et c’est véritablement sous son égide que The Next Generation prend son envol. Dès le départ Berman refuse de faire une nouvelle série se déroulant dans un vaisseau parcourant la galaxie pour cause de redite et, avec Michael Piller, il envisage de faire une série se situant sur une planète colonisée, prenant comme référence la série L’homme à la carabine (1958) dans laquelle un homme et son fils vivent dans un ranch entouré de différents personnages, archétypes de l’époque (le barman, le docteur, le shériff etc.).

Piller est probablement le scénariste le plus important de Star Trek : The Next Generation. Arrivé en 1988 vers la fin de la seconde saison, il écrira plusieurs épisodes de la troisième mais son influence se ressentira d’une autre manière. En effet durant ses deux premières années de production, la série connue une valse de scénariste et énormément de problème (notamment une importante grève de l'ensemble de la profession) et de conflit entre eux si bien que l’écriture prenait du retard et que les scénarios était constamment remaniés. Piller va remettre de l’ordre dans tout cela en créant un pole d’écriture solide avec une équipe stable (c’est ainsi lui qui engagea Ronald D.Moore) et en commençant à sortir des schémas classiques tel « l’alien/la situation de la semaine » pour développer plus en profondeur les personnages. Très clairement si Star Trek : The Next Generation passe de deux saisons très moyennes (voire très médiocre en ce qui concerne la première) à cinq saisons de très grande qualité, c’est grâce à Piller.

Les deux compères sont donc naturellement aux commandes de la nouvelle série qui sera, par la force des choses, la première série Star Trek non créée ou supervisée par Gene Roddenberry (qui décède le 24 octobre 1991). Ça ne sera pas la seule première de la série comme nous le verrons. A ce stade, évacuons le passage obligé quand on vient à parler de Deep Space Nine : sa ressemblance avec Babylon 5. Les deux séries ayant beaucoup de points en commun (même type de lieu et des personnages ou intrigues similaires), on peut légitimement se demander si l’une n’a pas plagiée l’autre. Si je ne connais pas la vérité sur ce sujet (et je ne pense pas que grande monde l’ai), voici mon sentiment avec les éléments dont on dispose. Si la production de Star Trek : Deep Space Nine remonte à 1991, le projet Babylon, lui, existe dans le cerveau de son créateur Joe Michael Straczynski depuis le milieu des années 80. Je ne m’attarderais pas sur le processus (on va dire que je vous garde ça de coté quand je repartirais revoir Sheridan, Ivanova, G’Kar, Londo et les autres) mais toujours est-il qu’en 1989, Straczynki fit le tour des studios avec une bible de la série, le scénario du pilote, des descriptions de personnages, des développements d’arcs scénaristiques et des visuels. Paramount fit parti de ces studios mais déclina le projet. En 1992 toutefois, Paramount officialisa le lancement de Deep Space Nine deux mois après que Warner annonça la production de Babylon 5. Straczynski a toujours estimé que Berman et Piller n’ont jamais plagiés son projet, il émet par contre l’hypothèse que des éléments de celui-ci leur ont été donné par les cadres de Paramount sans jamais que ceux-ci ne leur révèle la provenance réelle. Au final et avec le recul, le plus importante c'est que ces similarités sont guère dommageable tant les deux séries vont avoir des approches différentes et apparaissent aujourd'hui comme deux fleurons complémentaires du genre.

Revenons au début des années 1990. DS9 passe donc d’une série se déroulant sur une colonie à une série se déroulant sur une station spatiale. Outre l’unité de lieu fixe, l’autre grande nouveauté de DS9 sera de proposer un casting plus diversifié que The Next Generation. Là où cette dernière racontait l’histoire d'officier de Starfleet, DS9, elle, va introduire quatre personnages qui n’ont, à la base, aucun lien avec cette organisation. Il s’agit d’Odo, Quark, Kira et Jake (même si ce dernier est le fils de Sisko, il montre assez vite qu’il ne sera pas une copie de la tête à claque Wesley Crusher, le gamin de TNG). Cette variété sera une pièce maîtresse dans la démarcation de DS9 avec les séries précédentes.

 


 

 

En effet malgré toutes ses qualités, il est assez évidente que TNG est une version nouvelle génération de la série classique avec toujours un équipage de militaires face à des Vulcains, des Romuliens et des Klingons. DS9 quand à elle va se reposer sur un ensemble de race, presque, nouvelles : les Ferengis, les Bajoriens et les Cardassiens. Presque, parce que ces trois espèces apparaissent tout d’abord dans TNG. Les Ferengis apparaissent ainsi dans la 1ère saison de la série et se voulait devenir, pour Roddenberry et Berman, ses nouveaux grands antagonistes. Peine perdue, les Ferengis, dans leurs quelques apparitions, seront surtout des personnages ridicules et comiques. Pour DS9, Piller envisageait dès le départ qu’un Ferengi tienne le bar de la station et soit l’antagoniste du chef de la sécurité. Ça sera donc Quark et c’est avec lui qu’on va véritablement découvrir une race autrement plus passionnante que l’on imaginait et qui se pose comme la critique de la société humaine du 20ème siècle.

 


 

 

Les Cardassiens et les Bajoriens quant à deux apparurent dans Star Trek : The Next Generation en 1991 et ils semblent très vraisemblable que Piller et Berman envisagèrent d’en faire très rapidement les protagonistes majeurs de Deep Space Nine. Ainsi dès la saison 5 de TNG apparut, pour un rôle semi-régulier, le personnage de Ro Laren (Michelle Forbes) une Bajorienne membre de Starfleet, avec qui nous découvrons sa culture et la haine vis à vis des Cardassiens. Les plans initiaux de Piller était alors de faire de Ro Laren un des officiers qui quitterait l’Enterprise pour rejoindre DS9 au même titre que O’Brien dont on découvre le rôle durant la guerre entre Cardassia et la Fédération durant la quatrième saison. Ro Laren devait devenir le second de Sisko et servir de lien entre Starfleet et Bajor. Toutefois Forbes ne voulu pas s’engager dans un rôle régulier dans une série et déclina la proposition, Piller et Berman décidèrent alors de créer un nouveau personnage, celui de Kyra Nerys qui sera interprété par Nana Visitor, dont c’est le premier rôle régulier. On a pu la voir auparavant dans des épisodes de différentes séries tels que Les Routes du Paradis, Remington Steele, K2000, McGyver, Arabesque, The Colbys (le spin-off de Dynastie, annulée au bout de deux saisons) ou Dr Doogie. Ancienne danseuse (elle débuta à Broadway) elle mettra à profit son expérience pour ce rôle très physique. Kira Nerys est de plus le premier personnage féminin à être first officer dans une série Star Trek (rappelons que c’était initialement le choix de Roddenberry à l’époque de la production du pilote de la série classique, idée rejetée par la chaîne faisant alors de Spock le second de Kirk). Notons que malgré son refus, Michelle Forbes ne fut pas mise à l’écart et son personnage connu une conclusion à la fin de The Next Generation en rejoignant le Maquis une organisation de résistants (ou de terroristes c’est selon) qui sera développée dans Star Trek : Deep Space Nine et surtout dans Star Trek : Voyager (plusieurs membre du Maquis faisant parti de l’équipage du vaisseau). Preuve du travail de Berman pour renforcer l’univers partagé de ces séries.

Mais sur le casting, la grande première de Star Trek : Deep Space Nine (et qu’on peut aussi étendre à l’ensemble de la production télévisuelle américaine de l’époque) c’est bien sur le commandant Sisko interprété par Avery Brooks. Pour la première fois depuis 1973 (avec la fin de Mod Squad), un acteur noir est à la tête d’une série américaine dramatique au casting multi-ethnique et culturel. Bien sur, dans l’univers Star Trek, le racisme au sein de l’humanité n’existe plus et le personnage de Sisko n’a pas été pensé pour être directement interprété par un acteur noir. Le symbole est tout de même très important. Si Brooks fut choisi parmi plus de 300 candidats, c’est probablement (à l’instar de Patrick Stewart) pour sa carrière au théâtre et pour son parcours assez atypique. Musicien et chanteur (baryton) avant d’être acteur, Brooks est également enseignant et directeur artistique quand débute le tournage de la série. Autant dire qu’il sait gérer un groupe d’individu disparate.

 


 

 

Le reste du casting est un équilibre de jeunes acteurs et actrices (Siddig et Farrell) et d’acteurs plus expérimentés (Meaney, Auberjonois et Shimerman). Par la suite DS9 se distinguera par un casting important de personnages secondaires souvent interprétés par des visages connus, tels Louise Fletcher, la célèbre infirmière Ratched de Vol au dessus d’un nid de coucou, Andrew J Robinson (le tueur Scorpio de Dirty Harry), Wallace Shaw ou bien encore Jeffrey Combs.

On arrive en 1993 et la série est prête à être lancée. Le générique et la musique sont une nouvelle fois confiée à Dennis McCarthy (déjà en charge de la musique sur The Next Generation et qui continuera l’aventure avec Voyager et Enterprise), les décors sont prêts et la maquette de la station, conçue par Herman Zimmerman, Rick Sternbach et construite par Tony Meininger est prête à l’emploi. Comme rampe de lancement, The Next Generation laisse sa place durant un mois en se concluant provisoirement sur un double épisode, Chains of Command (assez grandiose au passage avec une prestation incroyable de Patrick Stewart), qui annonce la fin de l’occupation Cardassienne sur Bajor.

Le premier épisode de Star Trek : Deep Space Nine est diffusé en syndication le 3 janviers 1993 et c’est parti pour sept années durant lesquelles les préceptes et le dogme positif de Star Trek vont être rudement mise à mal.

 

 

 

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